Covid-19 L'Afrique à l'aide de l'Europe?

C'est la question que l'on peut se poser au vu des chiffres:  l'Europe a enregistré 20 fois plus d'infections et 58 fois plus de morts que l'Afrique, pour une population qui représente la moitié de celle-ci!

C'est vrai que les chiffres actuellement disponibles concernant l'Afrique montrent que l'épidémie progresse toujours, que les tests ne sont pas suffisants, que l'appareil statistique n'est pas développé, etc. Mais il est également possible que la structure démographique de l'Afrique ait pu jouer en sa faveur: on sait que c'est la tranche des 65 ans et plus qui est la plus vulnérable. Or cette tranche représente 3,5 % seulement de la population africaine, alors qu'elle est de plus de 18 % en Europe. Le fait que la grande majorité des pays africains ait eu recours au confinement a pu jouer également pour expliquer le faible nombre de victimes observé à ce jour.

Et pourtant, juste 4 mois après le début de la pandémie, (cf mon article précédent: Covid-19: 6 mois après) nous voyons déjà fleurir ici et là dans les médias occidentaux, des articles selon lesquels la situation en Afrique est absolument catastrophique et que celle-ci a besoin d'aide. Juste quelques exemples: "500 millions de personnes vont tomber dans l'extrême pauvreté" (OXFAM); "Il faudrait 2,5 trillions de dollars pour aider les pays pauvres" (Unctad); "Ils meurent de faim" (appel Avaaz), etc...

Pourtant la réalité est quelque peu différente, en tout cas en ce qui concerne l'aide. Selon certaines estimations, plus de 40 milliards de dollars quittent l'Afrique chaque année en direction du reste du monde.(1) Ce serait donc plutôt l'Afrique qui fournit de l'aide au reste du monde, et celà depuis plusieurs années déjà!

En réponse aux initiatives de l'Europe concernant l'aide à l'Afrique pour combattre le covid-19, je pense que l'Europe devrait continuer à se préoccuper d'abord de la santé de ses citoyens. Comme l'a dit l'intellectuel sénégalais Felwine Sarr: "Les Européens s’inquiètent pour nous et nous nous inquiétons pour eux” (2).

Par contre l'annulation des dettes qui pèsent sur les pays africains devrait être une mesure urgente. Par ailleurs, et étant donné le passé colonial de l'Europe, celle-ci devrait restituer une partie des richesses qu'elle a prélevées - et qu'elle continue de prélever - de l'Afrique, et lui verser des compensations suite à la destruction de pays entiers par l'exploitation coloniale, y compris l'esclavage dont les séquelles persistent à ce jour. Et enfin l'établissement de rapports basés sur une véritable indépendance des pays africains devrait être un principe sacré. C'est de cela dont l'Afrique a besoin.

Benyounès